By: Papyrus87 | January 22, 2018
Malentendus à réentendre
"Pourquoi ne connaissez-vous pas mon langage ?" (Jean 8:43 NBS)
22/01/2018
La question du littéralisme est une épine dans la chair du traducteur et de l'interprète.
Même si l'on sait qu'une traduction littérale peut trahir plus sûrement le texte qu'une traduction littéraire visant à rendre le sens selon le génie de la langue cible, il est difficile de céder à une forme subtile de littéralisme : "en réalité, l'original dit littéralement...".
La frustration de devoir laisser de côté une traduction littérale trouve en général sa revanche dans des notes de bas de page...
Le traducteur a ainsi des "littéralement" plein sa besace.
Certes, ces précisions ne sont pas inutiles pour comprendre le cheminement de la pensée traductrice.
Mais si elles restent un appendice du texte traduit dont celui-ci ne pourrait se passer, sans doute alors le texte n'est-il pas encore traduit.
Plus risqué, le recours à "l'original" en un ou deux clics de souris, qui fait du novice, en peu d'instants et sans effort, un spécialiste d'hébreu et de grec sûr de lui...
La phrase "l'original dit littéralement ceci ou cela" conserve sur certains auditoires un pouvoir certain de fascination, et de mystère qu'on révèle enfin...
Mais il y a littéralisme et littéralisme.
Celui qui cherche à transporter un mot d'un univers de langue dans un autre, et celui qui trahit le texte et la pensée du texte non pas sur le plan du lexique, mais sur celui du discours.
Et ce littéralisme-là n'est pas forcément chez le traducteur, mais aussi chez le "récepteur".
Il y a de nombreux exemples de paroles de Jésus, qui ne présentent pas de difficulté particulière de traduction (littérale ou non littérale), mais qui ont créé le malentendu sur un autre plan que celui des mots, malentendu rapporté ou suggéré dans le texte même.
Et là, le meilleur traducteur ne sera d'aucun secours.
Le choc entre deux registres de discours peut donner dans la vie courante des situations cocasses, ou au pire nous jouer des tours.
Dans les évangiles, c'est toujours dramatique, et l'enjeu est toujours spirituellement grave. Sauf de rares fois pour les disciples, Jésus ne dissipe jamais le malentendu qui – précisément — a maintenant, dans le récit et par le récit, une fonction de questionnement pour le lecteur.
Un rapide survol de tous les évangiles permet de se rendre compte que le malentendu est – pour Jésus et les évangélistes – un stratagème pour faire entendre.
Ici les exemples relevés.